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Futilité/innocence/refrains faciles. C’est à rebours de ces clichés sur le garage que la musique et les paroles en français des Guillotines puisent leur profondeur. En refusant le strict pastiche des années 1960, les quatre garçons donnent à ce genre musical un éclat noirâtre qui colle bien à l’époque. Le son des Guillotines est un garage hybride mité de psychédélisme à la BJM ou de pop sauvage ; on y entend parfois du rockabilly triste, du flamenco saumâtre et des couleurs dérangeantes – des ocres et des gris. C’est que leur rock’n’roll est contemporain car il semble à la fois vivant et débarrassé de l’enthousiasme conquérant des Trente Glorieuses.
Lorsqu’on tombe sur la face A du disque, on tombe. L’Aube est une ballade glissante dont la structure même a quelque chose d’une chute bizarre – à la fois fracassante et silencieuse. A leur échelle, les paroles rendent raison d’une certaine obscurité : comme dans les tragédies, l’extérieur et l’intime sont joints et dans l’espace indéterminé de la chanson, l’Aube Fatale semble annoncer la dérive du chanteur, du ‘je’. La voix est suave. D’une emphase un peu désuète, elle exprime toute la nostalgie du morceau et accroît la dramaturgie du récit. Car ce titre est un peu comme une aventure littéraire. Face aux déterminismes, guitares et basses s’accrochent fiévreusement mais l’énergie, électrique et romanesque, se heurte au glas d’une batterie dangereuse. Cette chanson a quelque chose d’une lutte un peu désespérée.
La face B étoffe le registre du groupe avec L’Absinthe, chanson plus énergique et entraînante que la précédente. Avec ses chœurs indisciplinés, son riff capiteux et son break final très enthousiasmant, le morceau rappelle directement les compiles de garage mythiques comme Back From The Grave. C’est un titre plus ironique que L’Aube , comme un jeu déséquilibré, une danse labyrinthique. C’est une lutte grisante, presque joyeuse, où theremin et fuzz semblent s’enchevêtrer dans des détours intéressants. Il y a aussi quelque chose de brouillon, d’inachevé et de laborieux dans ce titre mais ces imperfections participent au charme de l’ensemble.
Car la musique des Guillotines est avant tout une musique de l’errance marquée par l’incertitude, la mélancolie et beaucoup de naïveté… Avec ses mots et ses bruits déséquilibrés, en clair-obscur, elle rappelle parfois le visage étrange de la banlieue parisienne.
Les Guillotines – Les Guillotines (Croque Macadam, 2011)
1. L’Aube
2. L’Absinthe
Écrit par: Amelie
Hier, sans aucune forme de prétention, nous cherchions à transcrire et à réfléchir notre époque. Curieux et audacieux, défricheur passionné, nous explorions sans oeillères et à travers un contenu éditorial toujours riche
et exigeant l’ensemble des strates qui composaient le monde bouillonnant de la musique indépendante, ses marges souvent nichées dans le creuset du web comme le halo médiatique qui entourait certains. Mais çà c’était avant. Aujourd’hui, on fait ce qu’on peu !
dieu vous le rendra….
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