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Ici l’ombre. Saurez-vous trouver la lumière à l’écoute de Creatures Of An Hour, tant attendu premier album du quintette londonien Still Corners ? Car accepter de se perdre dans les méandres de ce labyrinthe émotionnel (dont la sortie chez Sub Pop, le label décidément en vogue de cette rentrée, est prévue le 11 octobre), c’est souscrire à une invitation au voyage où beauté et volupté se montrent aussi séductrices que destructrices. L’histoire veut que Greg Hughes, musicien américain ayant décidé de poursuivre sa carrière dans la musique à Londres, ait rencontré Tessa Murray de manière impromptue sur le quai d’une gare de la capitale anglaise par une nuit sombre et brumeuse. Une véritable scène de cinéma dont l’esthétisme, comme par enchantement, s’avérerait être en parfaite adéquation avec leurs aspirations musicales.  Les premiers EP (Don’t Fall In Love ou encore Cuckoo) annonçaient cette rêverie apocalyptique, Creatures Of An Hour confirme de manière étourdissante cet art musical qui s’écoute et surtout se ressent.
Car en quatre morceaux, pas un de plus, le décor est planté. La douce voix de Tessa Murray nous guide à travers son Pays des Merveilles, fait d’imagerie lynchéenne où émotion rime le plus souvent avec suffocation. L’inquiétant Cuckoo et sa guitare fantomatique en introduction suivi du vertigineux et entêtant Circulars nous captivent immédiatement avant qu’Endless Summer, pépite dream-pop enivrante que l’on pensait pourtant déjà connaître par cÅ“ur avec sa batterie implacable et son mur de réverbération, vienne une nouvelle fois nous envoûter. Point de salut, point de mât auquel s’attacher, impossible de résister à ce chant de sirène, nous voici otages consentants, prêts à assumer ce syndrome de Stockholm. Et comme pour mieux enfoncer le clou, Into The Trees nous entraîne dans une course effrénée, une quête éperdue à travers les bois (qui n’est pas sans nous rappeler celle d’un certain Robert Smith il y a déjà trente ans…) dont il est impossible de réchapper.
Nous voici assommés, le regard hagard… C’est alors que, pense-t-on, Creatures Of An Hour opère son virage… The White Season, exemple de somptueuse comptine qu’Isobel Campbell n’aura certainement plus jamais l’occasion d’entonner, nous prend par la main comme pour nous rassurer. Le rêve demeure éveillé mais se teinte de douces lueurs qui viennent apaiser délicatement notre errance. Mais l’accalmie est de courte durée : I Wrote In Blood réinstaure derechef ce climat d’incertitude jouant un jeu d’intimidation, qui n’est pas sans rappeler les plus intenses échanges entre Nancy Sinatra et Lee Hazzlewood. On attend d’ailleurs cette voix masculine, elle ne viendra jamais : Tessa Murray marque de son empreinte, domine, sans contrepartie. The Twilight Hour, avec ses vocalises et son orchestration toutes proches du meilleur Mercury Rev, le très broadcastien Velveteen et Demons, dont l’ambiance et la mélodie de guitare semblent tout droit sortis de la musette d’Hope Sandoval prolongent cet état de demi-sommeil éthéré et enchanté. Seul Submarine, morceau final, vient (paradoxalement) nous sortir la tête de l’eau ; enjoué, aérien, il nous informe que l’aube est proche et surtout que ce groupe a bien plus d’une corde à son arc pour atteindre SON esthétisme musical.
Impossible de sortir indemne de l’écoute du bouleversant Creatures Of An Hour. Comme au sortir d’une nuit agitée, les émotions ressenties se revivent, se décuplent pour enfin laisser place à l’apaisement. Une envie prédomine alors, replonger dans les abysses de ce monde fabuleux qui nous pousse à croire que, définitivement, nos nuits sont plus belles que nos jours.
Still Corners – Circulars
Still Corners – The Twilight Hour
Still Corners – Creatures Of An Hour (Sub Pop!, 2011)
1. Cuckoo
2. Circulars
3. Endless Summer
4. Into The Trees
5. The White Season
6. I Wrote In Blood
7. The Twilight Hour
8. Velveteen
9. Demons
10. Submarine
Écrit par: Eric
Hier, sans aucune forme de prétention, nous cherchions à transcrire et à réfléchir notre époque. Curieux et audacieux, défricheur passionné, nous explorions sans oeillères et à travers un contenu éditorial toujours riche
et exigeant l’ensemble des strates qui composaient le monde bouillonnant de la musique indépendante, ses marges souvent nichées dans le creuset du web comme le halo médiatique qui entourait certains. Mais çà c’était avant. Aujourd’hui, on fait ce qu’on peu !
dieu vous le rendra….
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