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Destroyer est déroutant. Il a souvent été incompréhensible, mystérieux, inquiétant mais toujours bouleversant à l’image de la petite dizaine d’albums aussi imparfaits qu’attachants qu’il a produits depuis une quinzaine d’années. Loin de moi l’idée de vous retracer les hauts et les bas de sa carrière. Vous avez déjà votre opinion sur les élucubrations de son chantre et peut-être même sur ce Kaputt. Mais alors pourquoi vous adresser mes impressions me direz-vous ? Pas seulement parce que le dernier album de Destroyer bénéficiait jusqu’ici d’une faible distribution et qu’il vient de ressortir en Europe grâce à  Dead Oceans et Differ-ant, mais surtout pour des raisons qui me sont chères. Tout d’abord, parce qu’il est difficile pour un produit d’une pop soignée de gagner l’intérêt d’un certain public. Comme si seuls les styles musicaux moins immédiats avaient le monopole de la profondeur et de l’authenticité. Ainsi, pour n’en citer que quelques-uns, certains projets essentiels, à l’image des carrières de Stephen Duffy, de Roddy Frame ou de Paddy McAloon, ont malheureusement souffert du manque de crédibilité pour ne gagner qu’un succès d’estime. Pour en revenir à notre sujet, les solos de flûte, de saxophone et de guitare, la rythmique classique, les chÅ“urs féminins sensuels (Sibel Thrasher) et la production plutôt soignée donnent une couleur faussement lisse et parfaite à ce Kaputt. Mais si l’auditeur méfiant s’abandonne à ce recueil, il découvrira heureusement que ladite pureté frottée aux compositions impies de Dan Bejar engendrent un antagonisme remarquable, une sorte de dédoublement de personnalité musicale à l’originalité rare. Ainsi, hormis l’emballage léché, les 9 constituants de Kaputt ne respectent pas un schéma de pop classique. Les disharmonies subtiles, les structures déstabilisantes, les moments d’intensité insoutenables font de cet album un pur joyau de la couronne spinescente de la discographie de Destroyer. Mais surtout Kaputt est un album sensible, fort et passionné. Bejar est ici le gardien des amoureux torturés, des complices fougueux qu’il couvre de son manteau, réelle enveloppe protectrice et voluptueuse. Il nous fait revivre la liquation et l’alliage ; il nous rend, pendant un peu moins d’une heure, la douce ivresse des moments divins passés dans les bras les plus précieux du monde… il apaise tous les amants séparés.
Destroyer – Kaputt (Dead Oceans, 2011)
1. Chinatown
2. Blue Eyes
3. Savage Night At The Opera
4. Suicide Demo For Kara Walker
5. Poor In Love
6. Kaputt
7. Downtown
8. Song For America
9. Bay Of Pigs
Écrit par: Calogero
Hier, sans aucune forme de prétention, nous cherchions à transcrire et à réfléchir notre époque. Curieux et audacieux, défricheur passionné, nous explorions sans oeillères et à travers un contenu éditorial toujours riche
et exigeant l’ensemble des strates qui composaient le monde bouillonnant de la musique indépendante, ses marges souvent nichées dans le creuset du web comme le halo médiatique qui entourait certains. Mais çà c’était avant. Aujourd’hui, on fait ce qu’on peu !
dieu vous le rendra….
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