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Disco’s Out… Murder’s In! – Entretien avec Heath Mattioli et David Spacone

today01/02/2017 512

Arrière-plan
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Si comme moi vous vous intéressez au punk, à Satan, aux comportements déviants et aux cultures en marge de manière générale, il y a de fortes chances pour que vous soyez familier avec la maison d’édition américaine Feral House. Un peu avant les fêtes je me baladais sur leur site dans l’idée de m’acheter le livre récemment sorti sur l’étrange cas de Craig Smith / Maitreya Kali, lorsque je suis tombé sur une couverture illustrée par Raymond Pettibon. Le titre de l’ouvrage en question : Disco’s OutMurder’s In!, son sous-titre : l’histoire vraie de frank the shank et du gang punk rock le plus meurtrier de Los Angeles.
Ayant grandi dans la scène punk hardcore hexagonale de la fin des années 90, début 2000 (j’ai d’ailleurs écrit un article à ce sujet l’année dernière) et ayant lu à peu près tous les livres valables documentant le mouvement, je pensais naïvement savoir plus ou moins tout ce qu’il y avait à savoir sur la tumultueuse et sinueuse histoire de la culture punk.
Pour moi, de manière générale, le punk et le hardcore en particulier est synonyme de fun évidemment mais aussi d’ouverture d’esprit et de questionnement. Je ne vais pas vous faire la longue liste des sujets politico-sociaux régulièrement discutés dans la scène, mais ils étaient nombreux et parfois passionnants. Et même si l’ambiance mal éclairée des squats attirait parfois des profils de marginaux aux allures louches de Guy Georges, que l’on se souvient des atmosphères sur-protéinées et testostéronées des concerts du Kickback de l’époque, que l’on a assisté à de belles démos de KDS (karate dancing style pour les profanes), que les mosh pits abritaient parfois quelques sadiques et que des chiens désorientés par les décibels évoluaient au milieu du public, la scène était globalement bienveillante et accueillante, pas de sensation de danger imminent, la violence y était plutôt moquée voir totalement rejetée, bien contenue en tout cas. Alors évidemment il est impossible de faire une comparaison entre mon vécu et la scène du L.A. de la fin des années 70, début 80 tant il s’agit d’espaces-temps et de contextes totalement différents et lointains, mais les termes « gangs punk rock » et « meurtrier » m’ont interpellé. Comment ça des gangs, des meurtres ? J’avais du mal à comprendre, c’était en contradiction avec la mythologie à laquelle j’étais habitué. Ceci étant, Reagan venait d’être élu, l’ère Carter était jetée aux chiottes et les jeunes américains cramé par le soleil de la côte ouest vivaient dans l’idée qu’ils allaient faire les frais de la menace imminente d’une apocalypse nucléaire sur fond de guerre froide. En ajoutant à ça des foyers brisés et une montée des violences policières entre autres différents problèmes sociaux-économiques, on peut imaginer comment le punk et l’attitude de défiance qui allait avec était le terrain de jeu idéal pour toutes sortes d’envies nihilistes. De plus, si on a lu les écrits de Henri Rollins, Keith Morris ou d’autres ou encore des livres comme American Hardcore : A Tribal History de Steven Blush, on est au courant de la violence engendrée par des meutes de gamins hors de contrôle, on entend parler de cliques et du danger mais ça reste assez fragmentaire, vague. En d’autres termes, je n’étais pas prêt pour ce que propose ce livre : un récit glaçant d’une scène infestée par la violence aveugle de gangs où la mort guette à chaque tournant, une sorte d’Orange Mécanique sous le soleil de Los Angeles.
Encore sous le choc, et même si je me réveillais un an après la sortie du livre, je devais en savoir plus et c’est pourquoi j’ai contacté les auteurs, Heath Mattioli et David Spacone qui ont eu la gentillesse de prendre le temps de répondre à mes questions, car même si leur ouvrage ressemble au journal intime d’un dangereux psychopathe, il a le mérite de rappeler quelque chose de fondamental, si les musiciens font la musique, c’est bien le public qui créé une scène et invente un mouvement, une culture, pour le meilleur et pour le pire.

Crédits photos par Feral House

Avant de parler de Frank et du reste, parlons un peu de vous, quelle était votre expérience du Punk/HC étant gamins ?
Before talking about Frank and all the rest, let’s talk about you guys, what was your Punk/HC experience like as kids ?

Heath Mattioli : Mon expérience était périphérique, en marge. J’écoutais la musique et je lisais les fanzines religieusement mais je me tenais à une distance de sécurité.

Dave Spacone : Je n’allais pas aux concerts avant le début de 1984, lorsque j’ai enfin eu une voiture, et la scène était hyper craignos. Je n’ai donc vu qu’une poignée de concerts mais j’ai eu l’occasion d’assister à de la vraie destruction. Avant ça je collectionnais simplement la musique.

Heath Mattioli: My experience was periphery and sidelines. I listened to the music and read the fanzines religiously, but stayed a safe distance away.

Dave Spacone: I didn’t make shows until early 1984, when I finally got a car and the scene was sketchy as fuck. So I only made a small amount of shows, but saw some honest to goodness mayhem. Before then I just collected the music.

Vous connaissiez Frank à l’époque ?

Did you know Frank at the time ?

H : J’ai brièvement rencontré Frank à une soirée en 1984. Dès que j’ai appris que les LMP allaient être là je suis parti. Lui et son gang avaient déjà une dangereuse réputation.

D : J’étais proche avec ses acolytes moins meurtriers donc je le voyais de temps à autre mais je ne traînais pas avec lui, bien trop dur pour moi.

H: I met Frank briefly at a party in 1984. As soon as I found out LMP was going to be there, I left. He and his gang already had a dangerous rep.

D: I was close with his less deadly associates, so I saw him around, but didn’t hang with him — too heavy duty.

Lorsque je lisais votre livre le premier truc que je me suis dit est que si j’avais été là-bas à l’époque, je me serais probablement tenu éloigné des concerts de punk et que ma vie aurait certainement pris une autre tournure. C’était comme se prendre une gifle mais j’imagine que c’était l’intention ?

When i was reading your book the first thing I said to myself was that had I been over there at that time I probably would have stayed away from punk rock gigs and my life would have turned out quite differently. It felt like a slap in the face but I guess that was also the point right ?

H : C’était clairement un truc à part ici, dans l’ouest sauvage. Les Angelenos interprétaient le punk rock comme tout le reste, de manière agressive.

D : Tu aurais eu de la chance de t’en tirer simplement avec une gifle.

H: It was definitely its own animal out here in the Wild West. Angelenos interpreted punk rock much like they do everything else… aggressive.

D: You would’ve been lucky if you only came out of it with a slap in the face.
Dans la préface de Lexicon Devil : The fast times and short life of Darby Crash and the Germs, Adam Parfrey, après s’être fait agresser par une bande de meufs et de gars à un concert des Germs se souvient : « Ce n’était pas des expériences hors du commun dans le Punk Rock aux alentours de 78-79, un prix que j’étais prêt à payer pour me sentir connecté à une scène dans une époque autrement stérile culturellement ». Ce n’est qu’après avoir lu votre livre que j’ai réellement saisi le sens d’une telle phrase et ça m’a vraiment troublé parce que le Punk en tant que phénomène culturel ou genre musical a été très largement documenté et j’ai lu plein de livres sur le sujet, mais aucun ne raconte exactement ce qui se passait à L.A. à l’époque. OK, on sait que c’était dur et violent mais pas mortel à ce point, comme s’il s’agissait d’une sorte de tabou. Vous vouliez exposer le secret inavoué du hardcore ?

In the publisher’s notes for
Lexicon Devil : The fast times and short life of Darby Crash and the Germs, Adam Parfrey, after being jumped by a bunch of chicks and dudes at a Germs show recalls : « These were not unkown experiences in punk rock circa ’78-’79, a price I was very willing to pay for feeling connected to a scene in an otherwise culturally barren time and place ». It’s only after reading your book that I fully grasped the meaning of such a sentence and it really bugged me because Punk as a cultural phenomenon and music genre has been very widely documented and I read countless books on the subject but none really tells what exactly was going down in LA at the time. Like ok, we know it was tough and rough but not straight up lethal, like it’s some sort of taboo. Did you want to expose Hardcore’s dirty secret ?

D : Absolument, si tu voulais participer au mouvement hardcore c’est ce avec quoi il fallait composer. La réalité l’emporte sur la perception sympathique du musicien. Il était temps de remettre les pendules à l’heure sur ce qui inspirait la musique, c’était la vie dans la scène.

H : Nous avons grandi en entendant tellement d’histoires cinglées venant de punks des tranchées qui étaient vraiment là (Ils prétendent tous avoir été là… demande leur). Nous pensions qu’il était important de raconter l’histoire du point de vue des gamins qui achetaient leurs places de concerts, le point de vue dysfonctionnel. Ce n’est pas tant un secret mais la plupart de ceux qui peuvent raconter ces histoires sont morts, derrière les barreaux ou ont pris leur distances.

D: Absolutely, if you wanted to participate in Hardcore, it’s what you had to live with. The truth trumps the happy musician perspective (no pun intended). It was time to set the record straight with what was inspiring the music. That was life in the scene.

H: Growing up, we heard so many nutty stories from the trenches, from punks who were actually there. (Everybody claims they were there… just ask them.) We felt it was important to tell the kids, who bought the tickets, side of things—The dysfunctional side. It wasn’t that it was a secret, but most that could have told you these stories are dead, locked up or just completely removed.

Ça m’a fait ouvrir les yeux sur le fait que beaucoup d’acteurs de la scène, de musiciens, semblent ignorer ces faits ou du moins les romancer quand ils se souviennent du bon vieux temps. Le seul auquel je pense qui a admis sa part de responsabilité dans le problème est Jack Grisham dans son livre An American Demon. Pourquoi une vaste majorité d’artistes semble refuser ou minimiser leur implication dans tout ça ?

It’s an eye opener, it made me realize that a lot of the players in bands at the time seem to deliberatly turn the blind eye on these facts or at least romanticize them when they reflect on the good old days. The only one I can think of who aknowledges his involvement in the problem is Jack Grisham in his book An American Demon. Why do a vast majority of artists seem to refuse or minimize their part of responsability in this whole thing ?

H : Je ne peux pas parler pour les musiciens et ils n’étaient pas vraiment impliqués dans ce qui se passait dans les ruelles, les slam pits ou les parkings. Bien sûr, certains devaient savoir qu’ils aidaient à inciter ces esprits vulnérables, mais la plupart des musiciens étaient trop occupés à se défoncer et à baiser des meufs et n’avaient aucune chance de… à moins d’être Jack Grisham ou Mike Ness.

D : A vrai dire la plupart ne voient pas les choses ainsi, sur le fait qu’ils avaient une énorme influence sur toute cette folie. La culpabilité est une émotion délicate à négocier. Je ne sais pas si je pourrais assumer non plus.

H: I can’t speak for musicians and they weren’t really part of what was going on in the alleyways, slam pits and parking lots. Sure, some must have known they were helping to incite these vulnerable minds, but most musicians were too caught up getting loaded, and banging chicks, they would usually have zero chance at… unless you were Jack Grisham or Mike Ness.

D: Truth be told, most don’t see it that way, that they had a major hand in the madness. Guilt is a tricky emotion to negotiate. I don’t know I’d be able to cop to any of it either.

Je n’ai jamais cru au fait que des paroles et une musique violente fabriquaient un public violent, pour moi il s’agit d’exprimer sa frustration d’une manière cathartique, créative et libératrice mais Frank dit que ça l’a bien rendu violent et clairement, ces gamins vivaient les choses différemment, c’était personnel, si bien que j’ai du mal à croire que les groupes ne réalisaient pas qu’ils jetaient de l’huile sur le feu, peut-être même qu’ils s’en nourrissaient ?

I’ve never believed in the fact that violent lyrics or violent music make violent audiences, I think it’s just a cathartic way to express frustration through art in a creative and liberating fashion but then Frank says that it did make him violent and clearly, these kids lived it differently, it was personal so I find it hard to believe that bands genuinely didin’t realize they were pouring gasoline on the fire and maybe even feeding off it ?

D : J’ai du mal à y croire également et franchement, il semblerait que pas mal d’entre eux modifient leur histoire de nos jours. C’est peut-être une astuce pour rester dans le coup ou pour vendre leurs livres, après que nous ayons dévoilé le pot aux roses.

H : Encore une fois, je suis sûr que certains musiciens punk devaient savoir et peut-être aimer jouer le rôle d’engreneurs, mais la plupart ne sont pas si intelligents qu’on le pense. Je pense que la plupart des musiciens sont de simples vecteurs. Je ne veux pas apparaître comme quelqu’un qui déteste les musiciens, j’ai beaucoup d’amis musiciens… et pas mal d’entre eux sont plutôt intelligents.

D: I find it hard to believe, and quite frankly, seems that a number of them are changing their story these days. This could be a ploy to stay relevant, or sell their book, after the fact, of us letting the cat out of the bag.

H: Again, I’m sure some punk rock musicians must have known and actually enjoyed playing the pusher part, but most were not as bright as one would think. I feel most musicians are just conduits. I don’t want to come off as some kind of musician hater. I have many musician friends… and a lot of them are fairly intelligent.

A la fois, même si Frank dit que la musique a contribué à le rendre violent, on réalise que ce n’était pas tellement à propos des groupes mais plutôt des gamins, ils menaient la danse, comme le dit Frank « le punk rock était entre nos mains ». Les groupes se faisaient cracher dessus ou pire, et ce même si le public les aimaient, achetait leur merch et payait pour leurs places de concerts. Il y a ce moment dans le livre où Tony Cadena des Adolescents se fait jeter dans une poubelle et humilier par un membre des LMP, ils n’en avaient tout simplement rien à foutre donc j’imagine que ça a plus à voir avec un contexte global. Qu’est-ce qui a fait que ces gamins de L.A. étaient comme ça ? Qui étaient-ils ? Qui était Frank ?

But at the same time, even if Frank says that the music helped making him violent, you realize that it wasn’t so much about the bands it was more about the kids, they were running the show, like Frank says, « punk rock was in our hands », bands were spat at or worse even if the audience liked them, bought their shit and paid for their concert tickets. There’s this episode early in the book where Tony Cadena of The Adolescents gets stuffed in a trash can and humiliated by an LMP member, they just didn’t give a shit. So I guess it’s got more to do with a conjunction of factors and a global context. What made these L.A. kids the way they were ? Who were they ? Who was Frank ?

H : Ces gamins étaient les filles et les garçons d’à côté, en colère, maltraités et mal aimés. Ils ont trouvé un intérêt commun qui était de te faire goûter à un peu de ce que la vie leur avait donné. Le punk rock était la parfaite Bastille.

D : Le hardcore de L.A. avait un son beaucoup plus agressif associé à une urgence inégalée. Ça a donné naissance au slam pit et ce genre de comportement a naturellement débordé dans la vie de tous les jours, les gamins se sont juste laissés embarquer.

H: These kids were the angry, abused, loveless boys and girls next door. They found a common interest, which was, to give you a little taste of what they were given. Punk rock was the perfect bastille.

D: LA hardcore had a sound that was much more aggressive, along with an unmatched urgency. That spawned the slam pit, behavior there naturally
spilled over the side and into every day life. Kids just got caught up.

Il existe pas mal d’histoires assez folles qui ont été raconté dans des livres par des gens impliqués dans le mouvement hardcore, comme celles de Jon Joseph ou Harley Flanagan à New York par exemple, mais qu’est-ce qui fait que L.A. semblait être une planète à part ?

There are quite a few crazy stories that have been told in books by guys involved in the hardcore movement, like Jon Joseph’s or Haley Flanagan’s from NYC for exemple, but what is it with L.A. that makes it look like it was a planet of its own ?

D : L.A. est enracinée dans la culture de gang. Cette mentalité de panier de crabes s’est naturellement infiltrée et a infecté le punk rock. Le besoin de se protéger des conservateurs, des sportifs musclés, de la police et de l’autorité en général a également joué un rôle. C’était un gros barril de poudre.

H : La côte est avait clairement sa part de violence liée au hardcore mais pas au niveau de ce qu’il se passait ici. La côte ouest est infestée de gangs depuis les années 20. La guerre du punk rock était tout simplement un autre dérivé.

D: LA is rooted in gang culture. That king of the hill mentality naturally seeped in and infected punk rock. Protection from squares, jocks, police, and authority in general, played a part as well. The whole thing was a powder keg.

H: The East Coast definitely had its share of hardcore violence, but not to the levels of what was happening out here. The West Coast has been gang infested since the 1920s. Punk rock warfare was just another spinoff.

La culture cholo des gangs de L.A. devait être un gros facteur mais du point de vue d’un outsider c’est difficile d’imaginer des cholos et des punks bras dessus, bras dessous, comment c’est arrivé ?

The L.A. cholo gang culture had to be a big factor but from an outsider’s point of view it’s hard to imagine cholos and punks embracing each other, how did that happen ?

H : Ces jeunes punks ont grandi dans des quartiers historiquement ancrés dans les gangs mexicains/vato. Les cholos étaient curieux de ce qui se passait à Hollywood. Ils voyaient ce qui passait aux infos et entendaient ces rumeurs de comportements antisociaux et violents c’était donc une association naturelle. Ça s’est passé dans tout Los Angeles, des communautés de la plage jusque dans la vallée. Les ennuis marchent main dans la main.

D : Les deux sous-cultures avaient des uniformes et un style qui étaient une démonstration ostentatoire de dureté qui communiquait le danger. Ça a tout de suite établi une sorte de parenté qui a donné lieu à une relation unique, différente de ce qui ce passait ailleurs dans le pays et dans le monde pour le coup. Le style, aussi marrant que ça puisse paraître, a joué un rôle important.

H: These punk rock kids grew up in neighborhoods that had historically, entrenched Mexican/vato gangs. Cholos were curious about what was happening in Hollywood. They saw on the news and heard the rumors of antisocial, violent behavior, so was a natural fit. This happened all over Los Angeles, from the beach communities, to the valley. Trouble walks hand in hand.

D: Both subcultures, came with uniforms and looks that were outward displays of toughness that communicated danger. This established a mutual kinship right away that fostered a unique relationship unlike anywhere else in the country, or world for that matter. Style, funny enough, played a big part.

Suicidal Tendencies étaient un peu des emblêmes de ce mode de vie mais j’ai toujours trouvé qu’ils en faisait un peu trop pour être vraiment convaincants, le délire me semblait un peu mis en scène, même si Mike Muir avait une vraie street cred de Venice Beach avec son frère qui était un membre originel des Dogtown Boyz… mais bon, encore une fois, c’est un point de vue d’outsider. Au final (et même si Cyco Miko se fait droiter par un LMP) c’est mecs là, comme beaucoup d’autres, avaient bien un gang autour d’eux et malgré tout vous avez qualifié LMP de « gang le plus mortel de L.A. ». J’imagine que cette attestation n’a pas été faite à la légère et pensez-vous que beaucoup des personnes qui savent ont une autre opinion ?

Suicidal Tendencies were posterboys for that lifestyle but I always thought they were a bit too much to be for real, the thing felt staged in a way even though Mike Muir had some solid Venice street cred his brother being a Dogtown original and all, but again, that’s from an outsider’s point of view. But it turns out (even though Cyco Miko got punched in the mouth by some LMP soldier) that these guys did have a gang around them like many, many others and still, you labelled LMP « L.A.’s deadliest punk rock gang ». I’m sure this statement wasn’t made lightly and do you think many people in the know would disagree ?

H : Laisse moi te poser cette question : quel gangster va dire que son gang était le deuxième meilleur ? les vrais gangsters ne respectent que les vrais gangsters, mentalité de panier de crabes de base. Suicidal avaient quelques tarés, LADS avaient les leurs, Circle One et LMP avaient insolemment máslocos.

D : Les gens qui savent peuvent ne pas être d’accord. Chacun a le droit d’avoir sa propre opinion en revanche, on ne choisit pas ses faits. Quand leurs livres sortiront, maintenant que nous avons ouvert les vannes, on pourra disséquer tout ça un peu plus.

H: Let me ask you this… what gangster is gonna claim his gang was second best? Real gangsters only respect real gangsters—basic crab mentality. Suicidal had some maniacs, LADS had theirs, Circle One and LMP defiantly had más locos.

D: People in the know can always disagree. Everyone is entitled to their own opinion, but not their own facts. When all their books come out, after we opened the floodgates, then we can dissect this even further.


Soit dit en passant, Suicidal a sorti une chanson en 1990, pas mal de temps après les événements racontés dans le livre donc, intitulée Disco’s OutMurder’s In!, vous pensez que c’est un clin d’oeil au graffiti sur le mur du Motel Hell ?

On a side note, Suicidal released a song in 1990, quite some time after the events depicted in the book, called
Disco’s OutMurder’s In! do you think it was their way to pay homage to the graffiti on the wall at Motel Hell ?

H : Je ne sais pas où ils ont trouvé le titre, mais il se trouve que beaucoup de gens se souviennent de l’avoir vu écrit sur le mur du Motel Hell des années avant la chanson. Personellement j’aime Suicidal Tendencies, le groupe. Ils étaient rapides et durs et méritent tout le respect qui leur est dû.

D : Peu importe la genèse du titre, c’est secondaire, ce morceau défonce !

H: I have no idea where they came up with the song title. However, more than a few, remember seeing it written at Motel Hell, years before the song. Personally, I dig Suicidal Tendencies, the band. They were fast and hard as ever and deserve all the respect they’ve earned.

D: Whatever the genesis of the song title was, comes secondary—that song rips!

Des liens entre une scène musicale et un underground criminel ont toujours éxisté, et ça a également été bien documenté, que ce soit le Jazz avec les mafias juives et italiennes, les Hell’s Angels et le Rock ‘n Roll ou ce qu’il s’est passé plus tard avec le Gangsta Rap (d’ailleurs je ne m’attendais pas à une apparition d’Easy E dans le bouquin). Mais au final, malgré les différences, il y avait toujours un truc basique au centre : l’argent. Rien de la sorte avec ces gangs de punks, il s’agissait de tout niquer, les autres équipes, des dealers, des maquereaux, les flics, des homosexuels, les gens qui allaient aux concerts, n’importe qui, le carnage sans raison tangible, le vrai visage de l’horreur. Comme le dit Frank était-ce juste si « amusant de haïr » ?

Links between a music scene and a criminal underbelly have always existed and that’s been well documented aswell, whether it be Jazz with the Italian or Jewish Mob, the Hell’s Angels and Rock ‘n Roll or what happened with Gangsta Rap (I actually wasn’t expecting Easy E’s appearence in the book) but at the end of the day, despite all the different specifics they all had something basic in common : money. No such thing with these Punk Rock gangs though, it was just about fucking up anybody in their way, other crews, dealers, pimps, cops, homosexuals, concert goers, anybody, mayhem with no tangible reason, the true face of horror. As Frank puts it, was it really just that « fun to hate » ?

D : Je crois sans aucun doute que cette musique est de la haine alimentée d’amusement. Ça implique le chaos qui accompagnait les concerts. Toute cette haine affichée aux concerts reflète à peine tout l’amusement. Il faut aussi considérer, à une micro échelle, la dure réalite à laquelle Frank et d’autres membres du gang étaient confrontés chez eux au quotidien. Ces conditions de vie génèrent une haine de soi qui finie par être projetée vers l’extérieur. Avoir une bande son qui allait avec a certainement rendu le fait d’haïr amusant. Leur haine est venue accompagnée de cette exhubérance particulière qui était illustrée dans le meilleur du hardcore sud californien.

H : C’était de l’amusement pour Frank et beaucoup de membres du gang et c’est devenu très addictif. Santino, le fondateur et la tête pensante derrière LMP, voulait répendre la peur à travers L.A. et la scène punk comme personne d’autre. C’était un leader très déstructeur et retors, presque machiavélique. Santino était à bonne école avec son père « Le Parrain ».

D: I believe, without question, that the music is undoubtedly fun filled hate. This includes the mayhem of the shows that came with it. All the hate on display at gigs merely mirrored that fun. Also, consider on a micro level, Frank and others in the gang’s abusive home lives. These conditions generate a self-hate that’s eventually turned outwards. Having a soundtrack for it certainly made it fun to hate. Their hate came with a very particular exuberance that was exemplified in the best of So-Cal hardcore.

H: It was amusement for Frank and many of his fellow gang members and became very addictive. Santino, the founder and driving force behind LMP, wanted to spread fear across LA and the punk scene like no other. He was a very destructive and cunning leader, almost Machiavellian. Santino’s father, Santino’s father, “The Godfather”, taught him well.

Les gamins comme Frank (et c’est fou quand on considère à quel point ils étaient jeunes) ont formé ces gangs pour se protéger des hippies et des connards de sportifs qui leur menaient la vie dure dans la rue, puis ils sont devenus les monstres à leur tour. Ils étaient également fiers de faire partie de ce changement qu’était le Punk/HC mais lorsque ça a évolué ils se sont sentis exclus. C’est presque triste quand Frank trouve que les nouvelles formes de musique ou de modes sont devenues « un tas de merde déroutant », quelque chose dans quoi il avait enfin trouvé sa place lui était soundain retiré, cruelle ironie non ?

Kids like Frank (and it’s crazy how young they were) formed these gangs to protect themselves from the older hippie and jock types who were bullying them on the streets and then they later became the monsters. They were also proud of being a part of this change that was Punk/HC but when it evolved they felt left out. It’s actually almost sad when Frank says that the music and new trends have become « a pile of confusing shit », something he finally fit into was suddenly taken from him, cruel irony don’t you think ?

H : La vie à L.A., la sous-culture, la musique évoluait à un rythme fascinant pendant les années 80. Je pense qu’aucune autre décénnie tient la comparaison. Une semaine t’étais à la pointe, la semaine suivante t’étais ringard. Etant donné que Frank et LMP étaient de la banlieue ils ne pouvaient pas tenir le rythme de l’appétit féroce de la scène d’Hollywood.

D : LMP était au sommet de la chaîne alimentaire, les leaders de la meute, et c’était très confortable. Pourquoi évoluer ? Pas si cruel si tu regardes ça comme ça.

H: LA life, subculture, music moved at a fascinating pace during the 1980s. I believe no other decade compared. One week you were hip, the next, you were out of step. Being Frank and LMP were from the suburbs, they couldn’t keep up with the Hollywood scene’s ferocious appetite.

D: LMP were top of the heap, leaders of the pack and very confortable. Why move forward? Not so cruel if you look at it that way.

Et puis Frank admet sa participation dans la déstruction de la scène. Vous pensez que la musique a en partie changé à cause de l’atmosphère pourrie crée par ces gangs ? Je veux dire, je pense que le Punk/HC était fait pour évoluer rapidement mais est-ce que ça a contribué à accélérer le changement ?

And then Frank aknowledges his part in ruining the scene. Do you think the music changed partly because of the messed up atmosphere these gangs were responsible for ? I mean, I think Punk/HC was meant to evolve rapidly but did they accelerate the shift ?

H : Les vrais artistes évoluent constamment, ils s’interrogent et interrogent les autres. Je pense que le temps du Punk/HC était révolu vers 84/85. Ça a implosé naturellement. Les gens en ont eu marre, sans parler des propriétaires de salles. Quelque chose d’aussi puissant ne pouvait pas durer.

D : Absolument, cette atmosphère crée par les gamins aux concerts était clairement devenue un poids trop lourd à porter. La musqiue et les musiciens devaient partir dans d’autres directions afin que la créativité puisse prospérer. L’art DIY et l’agressivité juvénile ne pouvaient pas continuer ensemble éternellement.

H: True artists are constantly moving, challenging themselves and others. I think hardcore punk rock’s time was over come 84/85. It naturally imploded. People had had it, not to mention the venue owners. Something that powerful could never last.

D: Absolutely, that atmosphere at shows, created by the kids, was definitely a burden that was too much to bear. The music, and musicians, had to go in a different directions in order for their creativity to thrive. DIY art and youth aggression couldn’t go on together forever.

Étant un lointain produit de cette évolution du Punk/HC devrais-je le remercier finalement ?

Being a distant product of that evolution of Hardcore should I sort of thank him for that after all ?

D : Remercie le fait que ta route n’ai pas croisé la sienne ou celle de son équipe.

H : Les français s’y connaissent en couteau non ? Forge de Laguiole.

D: Thank him and his gang for not crossing your path.

H: The French speak knife, right? Forge De Laguiole.

Blague à part, bien que captivant le merdier est vraimant flippant, quand on pense que c’est déjà bien assez horrible ça devient pire. On parle d’ados et certains ont des tableaux de chasse plus fournis que ceux de certains tueurs en série connus, c’est ultra flingué. En écrivant ce livre vous saviez que vous alliez exhumer des affaires irrésolues, ça a été compliqué d’obtenir les feux verts des gens impliqués qui sont toujours dans le coin ?

Jokes aside, although captivating the whole thing is truly horrific, when you think it’s already bad enough it gets worse. We’re talking about kids and some of them have higher body counts than well known serial killers, how fucked up is that ? When writing this book you knew you were going to bring up some unsolved murder cases, how hard was it to have all the okays from the people involved who are still around ?

H : Frank a eu tous les feux verts avant que nous commencions notre long processus d’interview. Mais nous avons quand même changé certains noms et quelques détails de crimes, comme indiqué dans la préface du bouquin, pour protéger les coupables.

D : Évidemment nous avons également consulté notre conseiller légal. On devait faire ça bien, sans répercussions de la part des forces de l’ordre, ce qui aurait certainement entrainé des réactions violentes de la rue.

H: Frank got the “okays” before we started our lengthy interview process. But, we still changed some names and details of the crimes, like we stated in the opening of the book… to protect the guilty.

D: Of course we went to our own legal counsel as well. We had to get it right, without any law enforcement repercussions, which would have surely manifested into blowback from the streets.

Les LMP sont-ils toujours un gang actif ? Et si oui, sont-ils proches de leurs racines punk rock ?

Is LMP still an active gang ? And if yes how close are they to their Punk Rock roots ?

H : Oui, LMP est et a toujours été actif. Je crois que pendant les années 90/2000 ils sont surtout restés dans le quartier, à foutre le bordel, à botter des culs. Mais il y a eu une résurgence dans la scène punk rock et apparemment les jeunes LMP l’ont adopté et représentent.

D : LMP, de part leur longue histoire en Californie du sud ont aussi une solide présence dans le système pénitenciaire californien. Nous ne savons pas quelles y sont leur affiliations ou leur poids, nous nous sommes surtout intéressés au passé.

H: Yes, LMP is and always has been active. I think during the 90’s and 2000’s, they just stayed mostly in the neighborhood, causing trouble… kicking ass. But, there has been a resurgence in the punk rock scene and the LMP youth apparently represent and embrace it.

D: LMP, due to their long history in So-Cal, also have a legitimate presence in the California Penal System. Who they’re affiliated with and the weight they carry there is unknown to us. We focused primarily on the old punk days.

Un autre truc marquant avec ce livre c’est son ton cru, impénitant, délivré à la première personne, similaire à celui d’une chanson de hardcore avec les paroles qui te sont jetées à la figure. Ça a été difficile de ramener Frank à cette époque, à cet état d’esprit ? J’imagine qu’il a changé depuis ?

Another striking thing about this book is the raw, unapologetic, first person delivery similar to the one of a hardcore song with lyrics thrown at your face. How hard was it to take Frank back to that era, to this state of mind ? I imagine he’s a changed man now ?

H : C’était vraiment la partie délicate du projet. Frank répétait sans cesse comment il aurait géré ces situations autrement aujourd’hui. Comment il réagissait sans réfléchir. Le ramener à comment il se sentait à l’époque était ce que nous recherchions. C’est ce qui rend cette histoire si intense. Entendre beaucoup des histoires racontées dans le livre lorsque nous étions gamins mais en voulant capter les émotions plus que les explications et les détails. Réanimer cette bombe à retardement était le coeur du truc. Certains jours il retournait à cet endroit, d’autres jours il voulait simplement papoter.

D : C’est précisément pourquoi ça a pris si longtemps, six ans d’un processus laborieux pour être éxact. Puis assembler toutes ces notes en une narration qui procure une expérience viscérale au lecteur était un autre travail. Par moment c’était un poids pour chacun d’entre nous, mais nous sommes heureux que le rendu ai fonctionné pour nos lecteurs.

H: That was the daunting part of this project. Frank constantly spoke of how he would have handled those situations differently now. How he just reacted without any thought at all. Getting him to go back to how he felt in the moment was what we were after. That’s what made this story so compelling. Hearing many of the stories, depicted in the book, when we were kids, and not just wanting the explanations and the details, but the emotion. Bringing that ticking time bomb back was the juice. Some days he would go there, some he just wanted to small talk.

D: This is precisely why it took so long, six years of that painstaking process in fact. Then, putting all those notes into a narrative that gives the reader a visceral experience was another task. It was a burden for all of us at times, but we’re pleased that the outcome has paid off for our readers.

J’ai lu quelque part que vous étiez en train de travailler sur une adaptation filmique, comment ça se passe ?

I read somewhere that you had a film adaptation in the works, how is that coming along ?

H : Oui, nous travaillons avec des producteurs et une grosse agence qui nous aide à boucler le projet. On espère commencer le tournage en 2017.

D : Nous avons écrit plusieurs jets de scénarios et nous sommes finalement tombés sur une version qui satisfait tout le monde. Heath et moi sommes les seuls auteurs.

H: Yes, we are working with producers and a very strong agency, which is helping to package the project. We are hoping to shoot in 2017.

D: We have written several screenplay drafts and finally have landed on a draft that everyone feels positive about. Heath and I are the sole writers.

Le film va suivre Frank ou abordez-vous l’histoire sous un autre angle ?

Is the movie going to follow Frank or are you tackling the story from a different angle ?


H : Dans le scénario que nous avons écrit Frank est le protagoniste. On se concentre essentiellement sur son foyer dysfonctionnel et ses exploits dans la rue et la scène entre 1979-83/84. C’est forcément une version moins étayée que le livre. Après le film, on espère enchaîner avec une série TV qui ressemblera plus au livre.

D : Etant donné que le livre a sa propre communauté de fans, il était important que les deux projets demeurent proches de la source.

H: In the screenplay (which we also wrote) Frank is the protagonist. Our main focus, on his dysfunctional home life and his exploits in the scene and on the streets from 1979-83/84. It’s obviously a much slimmer version of the book. We hope to follow the film with a TV show which will be much more like the book.

D: Since the book has its own cult following, it’s important that both projects stay close to the source material.


Avez-vous le sentiment de boucler la boucle, de ramener La Mirada à Hollywood mais ce coup-ci sur le grand écran ?

Do you feel you’re going full circle, bringing La Mirada back to Hollywood but this time on the silver screen ?

D : Oui, c’est assez ironique mais tu tapes dans le mille. Ça se passe rarement à l’inverse.

H : C’est une façon intéressante de voir la chose. La vie de Frank était faite pour le grand écran. Il y a tous les éléments nécessaires : amour, trahison, sang, sexe et punk rock, que faut-il de plus ?

D: Yes, it’s quite ironic, but you hit the nail on the head. Rarely does it happen in reverse.

H: That’s an interesting way to look at it. Frank’s life was meant for the silver screen. It’s got everything: love, betrayal, blood, sex and punck rock… what else do you need?

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Mixtape

1. X – Los Angels
2. T.S.O.L. – Superficial Love
3. Black Flag – No Values
4. The Adolescents – L.A. Girl
5. Circle Jerks – Wild In The Streets
6. The Germs – We Must Bleed
7. Fear – Gimme Some Action
8. Wasted Youth – Reagan’s In
9. 45 Grave – Black Cross
10. The Dickies – I’m A Chollo
11. Red Cross – Clorox Girls
12. Mad Parade- Real Horror Show
13. The Bags- Survive
14. The Middle Class – Out Of Vogue
15. Christian Death – Cavity-First Communion
16. Suicidal Tendencies – Discos Out… Murders In!

Écrit par: alexandre

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