HZ RADIO hz radio
J’avais déjà croisé le bonhomme lors du Midi Festival 2010. Touchant malgré lui, restant en retrait et à l’ombre, tandis que ses compères de Yuck se régalaient plage de l’Almanarre, Daniel Blumberg nous avait accordé une entrevue (voir) pour parler essentiellement de son groupe, pas encore auréolé du succès qu’on lui connaît à présent. Selon ses dires et son attitude d’oiseau blessé toisant mélancoliquement la vie, on devinait que les fameux morceaux de Yu(c)k – avec une parenthèse donc – dénotaient bien plus qu’une posture artistique. Un jardin secret par ailleurs peuplé d’une fantasmagorie couchée sur le papier que Daniel entreprend désormais de faire voler de ses propres ailes. Ainsi, Boiled Egg voit-elle le jour, micro-structure destinée à la publication de sa musique et de ses dessins, indépendamment de Yuck. Une façon d’affranchir son intimité en révélant celle-ci dans un autre contexte, celui d’OUPA. Premier refuge de cette charnelle escapade, entre comptines de chambrée et symphonies vespérales, Atelier Ciseaux publiait en août dernier Forget, une cassette éditée seulement à cinquante exemplaires. L’occasion pour nous de contacter une nouvelle fois le jeune homme tout en lui extirpant une mixtape aussi aboutie qu’instructive sur ses influences et ses accointances.
OUPA « FORGET » by atelier ciseaux
Qui es-tu Daniel ?
Who are you Daniel?
Je suis un artiste basé à Londres : je fais de la musique sous le nom de OUPA et avec le groupe Yuck.
I am an artist from London, I make music as OUPA and in the band Yuck.
Pourquoi un tel nom de groupe, OUPA ? Quelle est l’histoire…
How did you come up with this band name, OUPA? What’s the story…
Mon premier morceau, Weakend, est sorti sous le nom de Yuck. Initialement, je voulais que tout soit rattaché au groupe, pour pouvoir centraliser mes morceaux. Mais, c’était devenu trop déroutant, et j’ai changé de nom pour OUPA.
Oupa, c’est mon grand-père. Il jouait du ukulélé et du piano. Il jouait tout le temps au piano ces morceaux, longs et mélancoliques, à chaque fois que je venais le voir. J’aime assez le mot « Oupa » en lui-même, c’est aussi une sorte d’hommage que je rends à mon grand-père qui était le seul musicien dans ma famille proche.
My first solo release, Weakend, was under the name ‘Yu(c)k’. I started off wanting it to be quite attached to the band as a way of centralising my outputs. This was way too confusing though, so I changed the name to OUPA. Oupa was my Dad’s Dad and he used to play ukulele and piano. He played these long melancholy piano songs over and over again every time I saw him. I like the word Oupa and it’s also sort of a dedication to him as he was the musical man in my direct family.
Peux-tu expliquer en quelques mots quel est ton ambition musicale ? OUPA est pour toi la face intime de Yuck ou est-ce complètement différent ?
Could you introduce your musical project in a few words? OUPA is for you the intimate face of Yuck or is it completely different?
Je fais de la musique, produit et sors ma musique sous le nom de OUPA. Je viens tout juste de créer mon propre label, Boiled Egg, pour pouvoir sortir ma musique et mon travail en tant qu’artiste visuel, sans avoir à planifier ou attendre de trop. Je veux m’épanouir en tant qu’artiste en distribuant ce que je fais et passer à autre chose. Yuck est le groupe dans lequel je joue. Je compose avec Max et joue avec Mariko et Jonny, donc c’est vraiment séparé de tout ce que je peux faire avec OUPA. Yuck est un groupe d’amis qui travaillent ensemble : c’est très différent mais tout aussi gratifiant.
I make music and then record it and then release it using the name OUPA. I’ve just set up my own label Boiled Egg so I can release my music and visual art in a direct way without too much planning and waiting. I want to grow as an artist through releasing what I’ve done and moving on. Yuck is the band I’m in. I write the songs with Max and play with Mariko and Jonny, so it’s quite separate to the OUPA material. Yuck is a group of friends working together and so it’s a very different but equally rewarding experience.
Comment la musique est-elle entrée dans ta vie ? Quel est ton premier souvenir à ce sujet ?
How did music enter in your life? What are your first memories about it?
Je me souviens être assis dans une salle, parmi des tambourins et d’autres gosses de trois ans, qui bavaient et jouaient du tambour.
I remember sitting in a hall with tambourines and other three year olds rolling toys around, dribbling and beating drums.
Tu vis à Londres. Peux-tu nous dire en quoi ceci influence ta musique et si cela a de l’importance sur ton inspiration ?
You live in London. Can you describe how that affects your music and if it’s an important inspiration?
J’ai toujours vécu et travaillé à Londres, alors je ne peux pas vraiment faire de comparaison. Ceci dit, après avoir tourné et vu pas mal d’endroits, je pense vraiment que Londres a ce quelque chose de « translucide » : il n’y a pas vraiment de culture ou de tendance proéminentes, ça reste assez ouvert et varié. C’est pourquoi on peut faire ce que l’on veut, en étant sûr de toujours pouvoir trouver sa place à un endroit donné, d’une façon ou d’une autre.
I’ve always lived and worked in London so I have nothing to compare it to really. However after going on tour and seeing many places I do think London feels slightly translucent. I think there’s not really a clear culture or direction, its very open and diverse. So you can do whatever you want and it will fit in somewhere and somehow.
Quelles sont tes influences ?
What are your influences?
En termes d’influences musicales, j’aime beaucoup Mark Kozelec et Smog (Bill Callahan). Ce sont vraiment les deux seuls artistes que j’aime réécouter et qui continuent de me surprendre avec leurs nouvelles sorties. Silver Jews, Lambchop, Sparklehorse
Cet album était très personnel et parfois, on a juste besoin d’un peu d’encouragement des gens qui vous inspirent pour pouvoir aller jusqu’au bout sans avoir à partager.
In terms of musical influences, I really love Mark Kozelec and Smog (Bill Callahan). They are the two artists I can really go back to all the time and continue to excite me with their new releases. Other bands I love a lot are Silver Jews, Lambchop, Sparklehorse and Codeine. There was a London band called Video Nasties who were around a few years ago. I draw a lot of inspiration from them, especially the songwriter James Churcher. Two artists who were in London at the time I made the OUPA record and who I showed it to when I finished it were Alex Shields (A Grave With No Name) and Mauro Remiddi (Porcelain Raft). I think we were all being quite productive at the time so it was exciting and stimulating.
This record was so personal to me and sometimes you just need some encouragement from people you respect, to actually follow through with sharing it.
As-tu des ambitions particulières avec ce premier album de OUPA, Forget ?
Do you have specific goals for your first album, Forget?
Ma première ambition, alors que j’écrivais, était de tout sortir et de terminer aussitôt. Je voulais pouvoir retranscrire cette spontanéité temporelle dans l’album. J’ai enregistré chaque morceau live, à l’aide d’un dictaphone, pour pouvoir vraiment créer quelque chose d’intense et intime. J’espère que c’est ce qui se ressent à l’écoute, même juste pour une personne, quelque part, qui en ferait l’expérience.
My main goal when I was writing it was to get it down and out. I wanted to capture that time period in the record. I recorded every track live, on a Dictaphone so I was trying to create something intimate and intense. I hope that translates to a listener, even if it’s just one person somewhere who sits down with it and has an experience.
Quel type de sentiments essayes-tu de faire passer au travers ta musique ?
What kind of feelings are you trying to convey with your music?
Je crois que ça s’explique tout simplement à travers les morceaux, qui sont assez explicites.
I think that’s quite self-explanatory, the songs are pretty specific and explicit.
Dis m’en plus au sujet de ces deux merveilleuses chansons, Physical et New Home…
Tell me more about this two beautiful songs, Physical and New Home…
Ces deux morceaux ont été composés et enregistrés sur un orgue Casio. Physical a été écrit le même jour que Forget. Ce jour-là , j’ai su que ça deviendrait un album plutôt qu’un EP, car pour moi, ces morceaux (avec Those Are The Senses) sont à la base de cet album. Après avoir écouté Distortions de Clinic, j’ai vraiment eu envie de composer avec des orgues et des batteries électroniques, et je pense que Physical en a été le résultat, à un moment où je me sentais expressif. Avec Forget, j’ai vraiment laissé le champ libre à l’écriture, plutôt que de rester embourbé au stade de l’enregistrement. Après avoir fini l’album de Yuck, dont l’enregistrement fut assez long, je voulais vraiment juste écrire des morceaux et les enregistrer aussitôt.
New Home est un peu un intrus à ce niveau-là , car j’avais quelques pistes pour un morceaux, mais j’ai senti ce jour-là que je voulais passer plus de temps à enregistrer. C’est pourquoi ce morceau est un peu différent et un peu moins dénudé.
These two songs were written and recorded on my Casio organ. I wrote Physical on the same day I wrote Forget. I knew that day that it would be an album rather an EP because for me, those songs (along with Those Are The Senses) are the foundation of the record. After hearing Distortions by Clinic I really wanted to start working with organs and drum machines and I think Physical was drawing on that idea at a time I was feeling expressive. I was certainly letting the writing lead the way on Forget, rather than getting too bogged down in recording. After just finishing the Yuck record, which was a long process, I was really interested in just writing songs and capturing them instantly.
New Home is the odd one out in that respect because I had a sketch of a song and just felt one day that I wanted to spend a concentrated time recording. So that’s why there’s a different feel to that that song and more things going on.
Pourquoi avoir choisi le format K7 ?
Why did you chose K7 for this first LP?
Je n’avais pas de master pour ce LP qui n’avait pas été produit dans un studio très high tech, alors je me suis dit que ça serait un bon moyen pour que l’album existe. La compression sur cassette a réuni tous les morceaux dans un « tout » sonique, un procédé assez proche du « mastering ». En tant qu’artiste, j’ai l’impression que le format K7 est vraiment libérateur en ce moment. Je pense qu’il y a une sorte de détachement du monde digital, chose très rare et précieuse ces temps-ci.
Je voulais aussi que l’auditeur écoute l’album d’un seul coup. Avec une K7, on ne peut pas sauter un morceau ! Je pense que c’est un album qui demande du temps et une écoute intégrale, et ce format permet cela.
I didn’t master the record, and I didn’t record it in a studio using hi-tech equipment so I thought it would be a nice place for the record to exist. The compression of the tape seems to pull the songs together into a sonic whole in a similar way to mastering. As an artist I feel that tapes are the format of freedom at the moment. I think there’s a detachment from the digital world and that is very rare and precious these days.
I also wanted the listener to hear the album in one go. With a cassette you can’t skip the track! I think it’s an album that someone needs to spend time with and listen to as a whole and this format lends itself to that approach.
Merci à toi d’avoir répondu à nos questions et plus spécialement encore pour cette mixtape faite exclusivement pour Hartzine. Peux-tu nous introduire celle-ci ?
Thanks for the interview and the mixtape specially released for Hartzine ! Could you introduce it to us?
Voici quelques morceaux. Je pense qu’ils sont fantastiques.
Here are some songs I think are incredible.
Traduction : Simone Apocalypse
(DL)
01. Mark Kozelek – Up To My Neck In You
02. Slowdive – Alison
03. Williams, Lucinda – Are You Alright?
04. A Grave With No Name – Silver
05. Sparklehorse – Sea Of Teeth
06. Video Nasties – Stay Home
07. Pure X – Twisted Mirror
08. Smog – Ex-con
09. Lambchop – Being Tyler
10. Porcelain Raft – Backwords
Écrit par: Thibault
Hier, sans aucune forme de prétention, nous cherchions à transcrire et à réfléchir notre époque. Curieux et audacieux, défricheur passionné, nous explorions sans oeillères et à travers un contenu éditorial toujours riche
et exigeant l’ensemble des strates qui composaient le monde bouillonnant de la musique indépendante, ses marges souvent nichées dans le creuset du web comme le halo médiatique qui entourait certains. Mais çà c’était avant. Aujourd’hui, on fait ce qu’on peu !
dieu vous le rendra….
Hartzine the indie music webzine since 2007
Eric sur 09/11/2011
Merci !! mais vous avez oublié une question : quand viendra-t-il jouer Forget sur un coin de scène française ?
Dancetothetuner sur 09/11/2011
Merci pour cette (très bonne) interview !